Conakry : le non-respect des feux tricolores, un fléau qui alimente les accidents de la route

Conakry : le non-respect des feux tricolores, un fléau qui alimente les accidents de la route

À Conakry, l’ignorance des feux tricolores, surtout par les motocyclistes, cause des accidents graves. Autorités et ONG tirent la sonnette d’alarme.

Dans les rues animées de Conakry, le non-respect des feux tricolores est une habitude dangereuse, notamment chez les conducteurs de motos. Une infraction banalisée, mais aux conséquences souvent dramatiques, dénoncée tant par les autorités que par la société civile.

Les feux de signalisation, censés réguler la circulation et prévenir les collisions, sont de plus en plus ignorés. « Les usagers ne respectent pas la réglementation en vigueur, c’est-à-dire le Code de la route, surtout au niveau des feux tricolores », déplore Abdoulaye Diallo, commissaire principal de police et chef de division prévention, réglementation, liaison et statistique à la Direction centrale de la police routière. Il ajoute que les « motocyclistes pensent qu’ils ne sont pas concernés, alors que tous les usagers doivent respecter le Code de la route ».

Pour lui, ce comportement révèle un grave déficit de civisme. « Malgré toutes les campagnes de sensibilisation, les gens restent réticents. C’est un problème d’éducation et de civisme. Chaque citoyen doit connaître ses droits, mais aussi ses devoirs sur la route », rappelle-t-il.

Des conséquences parfois mortelles

Le non-respect des feux tricolores ne relève pas seulement d’une infraction administrative. Il peut s’agir d’une faute aux conséquences tragiques. « Les motocyclistes n'ont aucun respect pour le Code de la route. C’est pourquoi les accidents sont fréquents. Si vous allez à l’orthopédie dans les hôpitaux, vous verrez l’état alarmant des accidentés, surtout des jeunes entre 20 et 40 ans, parce que ce sont eux qui conduisent majoritairement les motos », souligne le commissaire.

Même constat du côté de la société civile. Mamadou Adama Barry est directeur exécutif de l’ONG Secours et Vie (SeVie). Il lance une alerte : « Ce comportement, bien que souvent banalisé, traduit un grave manque de discipline et de civisme. Ce n’est pas simplement une infraction au Code de la route, c’est une menace directe à la sécurité de tous les usagers », y compris les piétons et les riverains.

« Griller un feu rouge peut provoquer des collisions frontales ou latérales à grande vitesse, avec des conséquences dramatiques : pertes humaines, handicaps, traumatismes psychologiques. Pour les piétons, le danger est encore plus grand. Traverser au feu vert et se faire renverser par un conducteur imprudent est une réalité trop fréquente », regrette l’activiste.

Des sanctions, mais une autorité affaiblie… 

Face à cette indiscipline, les autorités peinent à imposer le respect des règles de la circulation. Le commissaire Diallo évoque des sanctions prévues par la loi : « Ce sont des amendes de deuxième classe pouvant aller jusqu’à 300 000 francs guinéens. La moto est saisie et mise à la fourrière. Si le propriétaire ne s’acquitte pas de la contravention dans un délai de 45 jours, elle peut être vendue publiquement en présence d’un huissier, et le montant reversé au Trésor public ».

Mais ces mesures restent peu dissuasives. Un motard, interrogé sous anonymat, confie : « Je ne respecte pas les feux parce qu’une fois arrêté, la police te harcèle, même si tes papiers sont en règle. On perd du temps et on gagne difficilement notre vie. Je sais que ce n’est pas bien, mais je n’ai pas le choix ».

Quelle issue entre sensibilisation et répression ?

Pour Mamadou Adama Barry, le respect des feux tricolores est un devoir citoyen. « J’invite tous les conducteurs à faire preuve de responsabilité. Les piétons doivent également rester vigilants, même lorsqu’ils ont la priorité. La route est un espace partagé, elle exige attention, patience et respect mutuel. Les autorités doivent à la fois renforcer la sensibilisation et appliquer les sanctions. L’impunité alimente l’indiscipline. La sécurité routière est l’affaire de tous », conclut-il.

Le commissaire Abdoulaye Diallo assure, pour sa part, que l’agent de police travaille comme un père de famille. « Nous sommes les garants de la sécurité routière. J’appelle les usagers à faire preuve de civisme, à respecter le Code de la route, les feux de signalisation, à réduire la vitesse, à éviter les surnoms sur les plaques et les surcharges. Ce sont là les causes les plus fréquentes des accidents graves », révèle-t-il.

 

Mamadou Barry