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Crise de liquidité en Guinée : Dr Ansoumane Camara décrypte les causes profondes du blocage bancaire, ses impacts sur l'économie et alerte sur les risques liés à l’introduction de nouveaux billets.
Depuis plusieurs semaines, le système bancaire guinéen traverse une période de crise de liquidité. Cette situation affecte de nombreux acteurs, notamment les entreprises, les particuliers et les ménages. Dr Ansoumane Camara, expert du secteur bancaire, nous aide à décrypter cette situation, dans une interview qu’il a accordée à un contributeur d’IdimiJam.com.
Dr Ansoumane Camara : Je dirais que le système bancaire est régi par des règles. Parmi celles-ci, la loi impose aux banques privées de déposer une partie des fonds de la clientèle à la Banque centrale (BCRG). C’est ce qu’on appelle la « réserve obligatoire ».
Donc, à partir des dépôts effectués par les clients, une fraction est envoyée à la Banque centrale. Toutes les banques privées disposent ainsi de comptes auprès de cette institution. Ce mécanisme constitue une garantie, non seulement pour la clientèle, mais aussi pour les banques elles-mêmes.
Ce que nous avons constaté ces derniers mois, c’est que lorsque les banques privées sollicitent une partie de ces réserves pour répondre aux besoins de leurs clients, elles ne reçoivent pas de réponse satisfaisante de la part de la Banque centrale. Résultat : les clients qui viennent faire des retraits ne sont pas servis, parce que les banques privées ne disposent plus de suffisamment de liquidités.
Le constat, c’est que l’État — l’autorité publique — puise dans l’argent qui ne lui appartient pas, c’est-à-dire les dépôts des banques privées, pour le placer à la Banque centrale. Cette situation a engendré une crise de confiance : d’abord entre les clients et les banques privées, ensuite entre les banques privées et la Banque centrale.
Aujourd’hui, les clients ne déposent plus leur argent dans les banques, ils se précipitent pour le retirer. On assiste donc à des retraits massifs, sans contrepartie en dépôts. Il y a une crise généralisée de confiance.
La situation est malheureuse, mais c’est la réalité. Il n’y a plus de confiance entre les déposants et les banques privées, ni entre les banques elles-mêmes. Or, le fonctionnement bancaire repose sur deux mouvements : le dépôt et le retrait. Si les retraits se multiplient sans nouveaux dépôts, il est évident qu’on finit par tomber dans une crise de liquidité, comme c’est le cas aujourd’hui.
Une entreprise qui ne peut pas faire un retrait supérieur à cinq millions de francs guinéens, c’est extrêmement problématique. Cela pénalise les entreprises, limite leur fonctionnement et réduit leur capacité d’investissement. C’est la première conséquence. L’autre conséquence concerne les ménages : on assiste à une forme de paupérisation croissante. Les citoyens s’appauvrissent du jour au lendemain. Et quand vous gardez de l’argent chez vous, cela attire inévitablement les malfrats. La situation est vraiment déplorable.
Il faut une réponse publique à la hauteur de la situation. Ce n’est pas seulement une crise technique, c’est un problème qui touche l’économie nationale dans son ensemble.
Quand j’entends le gouverneur de la Banque centrale dire qu’ils vont introduire de nouveaux billets, je trouve cela extrêmement préoccupant. Cela signifie qu’on s’oriente vers ce qu’on appelle la « monnaie hélicoptère », une approche non conventionnelle de la politique monétaire. Cela va engendrer une inflation sans précédent, qui va encore plus appauvrir les citoyens. C’est une décision très grave.
Ce n’est pas la bonne solution. Parce que si vous introduisez de nouveaux billets, les déposants — les clients des banques — vont vouloir retirer tout ce qui leur reste. Ils continueront à retirer, mais il n’y aura toujours pas de dépôts.
Si on vous autorise à retirer seulement cinq ou dix millions, même si vous avez cent millions sur votre compte, que ferez-vous ? Vous vous battrez pour retirer le reste, jusqu’au dernier franc.
Nous sommes sur une mauvaise voie. La solution n’est pas d’injecter de nouveaux billets, mais de restaurer la confiance dans le système bancaire. C’est cela l’urgence.
Propos recueillis par Fodé Touré