Drame à Manéah : « A mon retour du travail, j'ai trouvé toute ma famille ensevelie »

Drame à Manéah : « A mon retour du travail, j'ai trouvé toute ma famille ensevelie »

Un glissement de terrain meurtrier à Manéah, au pied du mont Kakoulima, a fait au moins 15 morts, 10 blessés et de nombreux disparus. Des familles entières ensevelies, les secours et volontaires s’activent dans des conditions difficiles. Témoignages bouleversants et appel urgent à l’action des autorités.

Un glissement de terrain meurtrier s’est produit dans la soirée de ce mercredi 20 août 2025 dans la commune urbaine de Manéah, située au pied du mont Kakoulima, à cheval entre les quartiers Kakoulimaya et Friguiadi Nord, dans la périphérie de la ville de Conakry. L’éboulement a provoqué la mort d’au moins 15 personnes, et fait 10 blessés ainsi que nombreux disparus, piégés sous les décombres (bilan encore provisoire). De nombreuses habitations ont également été englouties par la boue.

Quelques heures après le début du drame, un contributeur d’IdimiJam.com s’est rendu, ce jeudi 21 août, sur les lieux du drame. Sur place, l’inquiétude et la tristesse se lisent sur tous les visages. Autorités et volontaires s’activent, espérant retrouver des survivants.

Boubacar Bailo Diallo, imam et habitant du quartier, décrit l’ampleur des dégâts. « C’est à 20 heures, hier soir, qu’il y a eu ce drame. Environ 17 maisons se sont écroulées ici, englouties par la terre de la montage qui s’est écroulée (...) Nous conseillons à tous les Guinéens d’éviter de construire sous une montagne ou au bord des rivières. Car en cas de fortes pluies, cela peut causer des dégâts [comme c’est le cas ici aujourd’hui] », a-t-il lancé.

Ibrahima Sory Camara, agent de sécurité privée, a perdu cinq membres de sa famille, dont ses parents. « Nous habitions un immeuble de trois étages, avec des locataires à l’étage et nous au rez-de-chaussée. Aujourd’hui, mon père, ma mère, mes frères et sœurs sont tous morts. J’étais au travail quand le drame s’est produit. À mon arrivée, vers 2 heures du matin, j’ai trouvé toute ma famille ensevelie. Même chez les locataires, personne n’a été retrouvé. La terre a pratiquement englouti le bâtiment. On creuse depuis hier nuit sans relâche, mais les victimes sont en profondeur. Peut-être que ce lieu sera transformé en cimetière, car même les machines ne peuvent pas y accéder à cause de la boue », confie-t-il, dévasté.

Mory Keita, un habitant du quartier Friguiadi venu prêter main-forte, témoigne des difficultés rencontrées. « Je n’ai aucun parent ici, mais je suis venu aider. Depuis la nuit dernière, on creuse pour retrouver des éventuels survivants. Ce matin, on a pu sauver quatre personnes. Mais depuis, plus rien. C’est un travail très complexe. Je me suis blessé à la main, mais cela ne m’a pas arrêté », dit-il, pelle en main, les pieds recouverts de boue.

Demarche identique chez Thierno Hamidou Diallo, voisin des victimes. « Très tôt ce matin, je suis venu aider. Mais sans machines, c’est compliqué. On apprend qu’il y a encore des gens vivants sous les gravats. D’après certains, 11 personnes ont déjà été sauvées », explique cet habitant du quartier.

L’Etat appelé à agir

Pour Mamadou Moussa Baldé, chargé de communication du Conseil préfectoral des organisations de la société civile de Coyah, ce drame doit pousser l’État à agir. « Les citoyens doivent éviter de s’installer n’importe où. Perdre toute une famille est irremplaçable. L’État doit prendre des décisions courageuses pour éviter que chaque année, aux mêmes endroits, on vive les mêmes drames : inondations, glissements de terrain… », lance l’activiste.

Sur le terrain, Mamadouba Camara, président de la délégation spéciale de Manéah, revient sur la gestion de la catastrophe. « Depuis hier, à 20h15, nous sommes mobilisés. Nous avons alerté les chefs de quartier et les conseillers (...) Certains habitants avaient été dédommagés récemment pour quitter ces lieux dangereux. Mais beaucoup ont refusé de partir, et voilà où nous en sommes », assure-t-il, sans que nous ne soyons en mesure de confirmer cette allégation.

À l’hôpital préfectoral de Coyah, impossible d’obtenir des chiffres précis sur le nombre des victimes, l’administration invoquant une décision préfectorale interdisant toute communication sans ordre de mission. Mais selon l’Agence nationale de gestion des urgences et catastrophes humanitaires (ANGUCH), le bilan provisoire s’élève à 15 morts, 10 blessés et de plusieurs portés disparus.

Djenaba Diakité