À Conakry, l’entreprise Mana Gnuma SARL, fondée en octobre 2018, s’impose comme un acteur clé dans la lutte contre la pollution plastique. Son objectif ? Transformer ces sachets d’eau, omniprésents et polluants, en produits utiles et durables.
Chaque année, la République de Guinée produit plus de 485 000 tonnes de déchets plastiques non biodégradables, selon le ministère de l’Environnement et du Développement durable. À Conakry, la capitale, ce sont plus de 1 200 tonnes d’ordures, majoritairement des déchets plastiques, qui s’accumulent chaque jour, engendrant de graves conséquences pour l’environnement et la santé publique. Une étude réalisée en 2017 révèle que chaque habitant du pays produit en moyenne 0,603 kg de déchets plastiques par jour. Ces déchets, souvent abandonnés dans les rues ou les décharges sauvages, finissent par polluer les sols, les cours d’eau et les écosystèmes.
Face à cette urgence environnementale, l’entreprise Mana Gnuma SARL, fondée en octobre 2018, s’impose comme un acteur clé dans la lutte contre la pollution plastique. Son objectif ? Transformer ces sachets d’eau, omniprésents et polluants, en produits utiles et durables tels que des sacs à dos, des portefeuilles, des sacs à main ou encore des manteaux. Cette initiative innovante non seulement contribue à réduire les déchets plastiques, mais participe également à la sensibilisation des citoyens sur l’importance du recyclage et de la préservation de l’environnement.
L’activité de recyclage de Mana Gnuma s’organise autour d’un atelier situé à Kissosso, dans la haute banlieue de Conakry. Là, les sachets plastiques sont collectés, désinfectés, lavés, séchés et transformés en matières premières prêtes à être assemblées. « Un seul sachet va prendre deux autres sachets. Il faut les mettre dedans pour ne pas que les gens voient ce qui est à l'intérieur du sac et garantir sa durabilité », explique Fodé Camara, gérant de l’entreprise. Par exemple, un sac à dos grand modèle nécessite 124 sachets plastiques, tandis qu’un petit modèle en requiert 64.
Pour encourager les citoyens à participer à cette démarche écologique, l’entreprise achète parfois les sachets d’eau usagés à 1 000 ou 2 000 GNF le kilo, selon leur état. « Si les sachets sont propres, je paie ça à 2 000 GNF le kilo. Si c’est sale, je paie à 1 000 GNF le kilo, car le nettoyage et le traitement prennent du temps », précise Fodé Camara.
Le processus de transformation est rigoureux : après collecte, les sachets sont ouverts verticalement, désinfectés dans de l’eau de javel pendant 30 minutes, puis lavés à plusieurs reprises avec du savon, rincés, et séchés au soleil pendant trois jours. Une fois prêts, ils sont assemblés avec des accessoires tels que des fils, des aiguilles, des pagnes et des fermetures pour créer des produits finis de haute qualité.
Des produits appréciés par la clientèle
Les produits de Mana Gnuma, comme les sacs à dos écologiques, séduisent de nombreux utilisateurs. Elhadj Almamy Sangaré, qui utilise l’un de ces sacs pour l’école depuis six mois, témoigne : « Je l’utilise même en saison pluvieuse. C’est un sac de très bonne qualité et imperméable. Rien n’a été mouillé sous la pluie. En plus, cela contribue à rendre Conakry plus propre grâce au recyclage ».



Mais malgré son impact positif, l’entreprise fait face à des défis, notamment le manque de financements et de matériel. « Aujourd’hui, on a vraiment besoin de transmettre nos compétences à d’autres personnes, mais si on n’a pas les moyens », regrette Fodé Camara qui ambitionne de créer une véritable industrie locale de production de sacs écologiques pour réduire la dépendance de la Guinée aux produits importés, pas toujours respectueux de l’environnement. « Mon but, c’est d’installer une industrie qui va contribuer à la fois à la production de sacs et à la protection de l’environnement », ajoute-t-il.
Un problème à l’échelle mondiale
Selon le Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD), le monde produit chaque année 438 millions de tonnes de plastique. Parmi elles, au moins 8 millions de tonnes finissent dans les océans, causant la mort d’un million d’oiseaux de mer et de plus de 100 000 mammifères marins. Avec 500 milliards de sacs plastiques utilisés dans le monde, représentant 10 % des déchets produits, il est urgent de lutter contre cette crise écologique. Des initiatives comme Mana Gnuma montrent la voie pour bâtir un avenir plus durable et responsable.
Elisabeth Zézé Guilavogui