Le Tribunal de Première Instance de Kankan a rendu son verdict dans l’affaire du meurtre brutal de dame Adama Konaté, tuée au quartier Banankôrôda. L’accusé, Bangaly Traoré, a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, avec une période de sûreté de 30 ans.
Le Tribunal de Première Instance de Kankan a rendu son verdict dans l’affaire du meurtre brutal de dame Adama Konaté, tuée au quartier Banankôrôda. L’accusé, Bangaly Traoré, a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, avec une période de sûreté de 30 ans. Un jugement rendu en une seule journée, qui suscite de nombreuses interrogations dans l’opinion publique, notamment en raison de sa célérité.
Un procès éclair, des preuves accablantes
Le 20 mars dernier, Bangaly Traoré, chauffeur de profession, ôtait la vie d’Adama Konaté, une mère de famille avec qui il entretenait une relation. Le crime, commis à l’arme blanche en plein jour dans une boutique du marché Dibida, a été capté par une caméra de surveillance. Les images, largement relayées sur les réseaux sociaux, montraient l’homme en flagrant délit, un couteau à la main et la victime inerte au sol.
Arrêté sur les lieux, l’auteur présumé du meurtre a ensuite revendiqué son acte dans une vidéo Facebook en direct, suscitant une vague d’indignation à travers le pays. Face à la gravité des faits et à la clarté des preuves, le tribunal a jugé l’affaire sans délai.
La légalité d’une procédure accélérée
Pour Me Foromo Frédéric Loua, avocat et défenseur des droits humains, la rapidité du procès est conforme au droit. « Il n'y a pas de délai légalement imparti au juge pour juger une affaire, qu'elle soit criminelle ou pénale », explique-t-il. Dans ce cas, les éléments à charge étaient accablants. « Il a été pris dans le feu de l'action, avec le couteau à la main, la victime à côté, et la caméra publique là-bas. Donc, il a été arrêté en flagrant délit », justifie-t-il.
Une émotion nationale, une justice sous pression
Le meurtre d’Adama Konaté a profondément choqué l’opinion publique. Des organisations féminines, des activistes et de simples citoyens ont exigé que justice soit rendue sans délai. Dans cette atmosphère chargée d’émotion, la justice guinéenne semble avoir voulu envoyer un signal fort. « Il n'y a pas de raison à traîner », insiste Me Loua, qui estime que la réponse judiciaire rapide était nécessaire dans ce contexte.
Mais qu’en est-il des autres dossiers ?
Cette célérité inhabituelle met toutefois en lumière un contraste avec de nombreux autres dossiers qui stagnent dans les tiroirs de la justice guinéenne. Me Loua déplore cette inégalité de traitement. « Il faut que, justement, la justice se démerde pour que les dossiers qui traînent là soient jugés », martèle-t-il. Il rappelle que tous les détenus ont des droits, y compris ceux en détention préventive depuis des mois, voire des années, sans jugement.
Une affaire emblématique d’un système à deux vitesses ?
Si l’affaire Bangaly Traoré a bénéficié d’une attention exceptionnelle, elle interroge sur les lenteurs habituelles du système judiciaire. Elle soulève aussi la question de l’équité dans le traitement des affaires pénales. La justice peut-elle être rapide uniquement sous la pression de l’opinion publique ? Et que faire des centaines de détenus oubliés dans les geôles guinéennes ?
Ce procès, aussi expéditif que symbolique, relance le débat sur l’efficacité, l’indépendance et l’uniformité de la justice dans un pays encore marqué par des inégalités d’accès à la vérité judiciaire.
Hadja M’bambé