À Conakry, le quartier de la Cimenterie reste sans lycée public. Faute d’infrastructures, des centaines d’élèves parcourent chaque jour plusieurs kilomètres pour étudier, au risque du décrochage scolaire.
À Conakry, le quartier de la Cimenterie ne dispose toujours pas de lycée public. Un vide éducatif qui pousse des centaines d’élèves, après le BEPC, à parcourir de longues distances chaque jour pour rejoindre Lansanaya ou Kagbelen. Faute de moyens financiers et logistiques, beaucoup d’entre eux sont menacés de décrochage scolaire.
La Cimenterie est l’un des quartiers les plus peuplés de la commune de Kagbelen. Pourtant, malgré cette densité démographique, aucun lycée public n’y a été construit. Résultat : les élèves qui terminent le collège doivent impérativement se tourner vers des établissements privés souvent inaccessibles pour les familles modestes ou se déplacer vers des zones voisines comme Lansanaya, Kagbelen ou Sonfonia.
Mais ces trajets quotidiens, qui peuvent représenter plusieurs kilomètres à parcourir, posent de sérieux problèmes aux élèves. « Parfois je ne trouve même pas de transport pour aller à l’école. Dans ces cas-là, je reste à la maison et je rate les cours. Même quand je pars, j’arrive souvent en retard et fatiguée parce que je marche parfois. Je vis avec ma mère plus mes petites sœurs et mon papa est malade au village. Après avoir eu mon BEPC, au Collège public d'Ansoumania Plateau, j'ai décidé de m'inscrire au lycée Malick Condé à Kagbelen. Je ne paye pas de mensualité, mais par manque de transport, je peux manquer les cours pendant une semaine ou plus. Par jour il me faut 12000 GNF normalement sans compter mon mangé et pour économiser, de chez moi jusqu'au carrefour, je marche pour payer 4000 GNF aller-retour », témoigne une élève que nous appelons Rama*.
Son témoignage est loin d’être isolé. De nombreux élèves de la Cimenterie se retrouvent confrontés aux mêmes réalités : marcher de longues distances faute de transport pour emprunter un taxi. « Dans ce cadre de figure, beaucoup d’élèves venant de la Cimenterie ou ailleurs arrivent épuisés en classe. Ils ont du mal à suivre les cours et à se concentrer. Certains s’endorment même en plein cours. Cela joue directement sur leurs résultats scolaires », confie Ansoumane Keïta, enseignant.
Pour les familles, le problème est aussi économique. Le transport quotidien représente une charge supplémentaire qu’elles ne peuvent pas toujours assumer. « Je paie déjà les fournitures, l’uniforme et les petits frais de scolarité. Ajouter chaque jour l’argent du taxi, c’est impossible pour moi », confie Mariama Bangoura, parent d'élèves.
Certains parents, faute de solutions, préfèrent déscolariser leurs enfants ou les orienter vers des métiers précoces. Un choix contraint qui réduit les chances de réussite et limite l’avenir professionnel de toute une génération.
L’absence de lycée public à la Cimenterie met en lumière les inégalités d’accès à l’éducation en Guinée. Les élèves des quartiers qui disposent d’infrastructures scolaires publiques peuvent poursuivre leurs études dans des conditions normales, tandis que ceux de la Cimenterie doivent redoubler d’efforts pour accéder au lycée. « L’éducation doit être un droit pour tous. Or, quand on oblige un élève à marcher plusieurs kilomètres chaque jour, ou à dépendre d’un transport incertain, on ne lui donne pas les mêmes chances de réussir que son camarade d’un autre quartier mieux équipé », explique septuagénaire à la retraite.
Depuis plusieurs années, les habitants de la Cimenterie plaident pour la construction d’un lycée public. Mais jusqu’ici, leurs appels restent sans réponse. « C’est une nécessité urgente. Nos enfants ont droit à la même chance que les autres. Un lycée ici changerait beaucoup de choses », insiste Mariama Bangoura.
Faute de lycée public à la Cimenterie, certains jeunes lycéens continueront à parcourir des kilomètres pour étudier, au prix d’efforts physiques et financiers considérables. Mais l’avenir scolaire de toute une génération reste suspendu à la construction de ce lycée tant attendu. Pourtant l'annonce de construction des centaines d'écoles en Guinée par les autorités gouvernementales a été multipliée ces dernières années, mais la concrétisation sur le terrain tarde à se matérialiser.
Mohamed Diawara