En Guinée, surtout en milieu rural, trop de femmes enceintes négligent ou n’ont pas accès aux consultations prénatales. Une réalité inquiétante aux conséquences parfois tragiques.
En Guinée, malgré les nombreux efforts fournis par la communauté sanitaire pour améliorer la santé des femmes enceintes, le refus ou la négligence du suivi prénatal reste une réalité inquiétante chez de nombreuses femmes enceintes, surtout dans les zones rurales. Cette situation met en danger la vie de la mère et celle de son futur enfant. Un contributeur de la plateforme citoyenne IdimiJam.com s'est intéressé à ce sujet.
La consultation prénatale est un ensemble de soins médicaux destinés à accompagner la femme enceinte tout au long de sa grossesse. Elle permet non seulement de suivre le bon développement du bébé, mais aussi d’identifier rapidement d’éventuelles complications et d’éviter des imprévus.
Selon les recommandations des professionnels de la santé, quatre consultations prénatales sont nécessaires au cours de la grossesse : la première entre la 13ᵉ et la 16ᵉ semaine, la deuxième entre la 24ᵉ et la 28ᵉ semaine, la troisième à partir de la 32ᵉ semaine et la quatrième à partir de la 36ᵉ semaine.
Chacune de ces étapes est essentielle pour vérifier la santé de la mère et du bébé à naître. Pourtant, de nombreuses femmes ne se présentent pas à temps, ou pas du tout, dans les structures sanitaires à travers la Guinée.
Selon Nemotte Falle, sage-femme, plusieurs facteurs expliquent ce refus. « Il y a des femmes qui tardent à prendre le carnet prénatal par négligence ou par ignorance. D'autres n’y vont que lorsque leur mari leur donne de l’argent. Et puis, dans les zones rurales, la distance des centres de santé est un vrai problème », explique-t-elle.
Dans certains villages, les routes sont impraticables, les moyens de transport rares, et les centres de santé trop éloignés. Les femmes préfèrent alors rester chez elles, espérant que tout se passera bien, comme cela a pu être le cas pour d'autres ou par le passé (pour celles qui sont à leur énième grossesse).
Accoucher à la maison reste courant dans plusieurs régions, même si les autorités sanitaires le déconseillent fortement. Certaines femmes affirment qu’elles ont déjà accouché chez elles sans problème, mais cette professionnelle de santé rappelle que cela peut entraîner des conséquences graves. « Un accouchement à domicile n’est pas sécurisé. Ce n’est pas un lieu stérile. Ce qui augmente les risques d’infections graves après l’accouchement. En cas de saignement, de déchirure ou d’hémorragie, l’absence de personnel qualifié peut entraîner la mort de la mère ou du bébé », explique Nemotte Falle.
Elle précise aussi que certaines femmes souffrent de maladies comme la drépanocytose, l’hypertension ou l’anémie, qui peuvent provoquer des complications graves si l’accouchement n’est pas suivi médicalement. « Dans certains cas, seule une évacuation rapide vers un hôpital peut sauver la vie de la femme », rappelle-t-elle.
La consultation prénatale permet également de faire des examens importants comme l’échographie obstétricale, qui joue un rôle crucial dans le bon suivi de la grossesse. Elle permet de : connaître l’âge réel de la grossesse ; vérifier si le fœtus est bien positionné ; détecter la présence de fibromes, kystes, ou grossesse extra-utérine ; décider si la femme peut accoucher naturellement ou si une césarienne est nécessaire. « Grâce à l’échographie, on peut prévoir le type d’accouchement et sauver des vies. Elle permet aussi de détecter certaines anomalies dès les premiers mois », explique la sage-femme.
Le refus du suivi prénatal ne met pas seulement la mère en danger. Le bébé aussi est exposé à des risques importants. « Si la mère ne se fait pas vacciner, l’enfant peut être contaminé par le tétanos ou par des infections comme la syphilis congénitale. Cela peut entraîner des malformations comme le bec de lièvre, ou des troubles graves comme la cécité ou des retards mentaux », précise notre interlocutrice.
Ces maladies, souvent évitables, ont des conséquences durables sur la vie de l’enfant et sur sa famille. Pour réduire ces risques, la sage-femme insiste sur la nécessité de sensibiliser davantage les femmes, les familles et les communautés. « Dès qu’une femme se rend compte qu’elle est enceinte, elle doit se diriger vers un centre de santé. Chaque grossesse est un cas particulier. Seul un suivi médical régulier permet de garantir la sécurité de la mère et du bébé », insiste-t-elle.
Il est aussi important que les maris soient impliqués dans le suivi de la grossesse, car leur soutien financier et moral est souvent déterminant dans la prise de décision des femmes.
La santé maternelle reste un enjeu important pour le développement de la Guinée. Refuser le suivi prénatal n’est pas une simple négligence : c’est un risque réel pour deux vies (celles de la mère et de l’enfant). C’est pourquoi les autorités sanitaires, les ONG, les associations communautaires et les citoyens doivent travailler ensemble pour lever tous les obstacles à l’accès aux soins.
Mohamed Diawara