Plage de Lambanyi : quand le remblai menace le littoral

Plage de Lambanyi : quand le remblai menace le littoral

La plage de Lambanyi subit des remblais anarchiques menaçant mangroves, biodiversité et littoral. Experts et juristes appellent à une action urgente.

La plage de Lambanyi, longtemps un refuge naturel de mangrove et de sable fin, voit son littoral disparaître sous le béton et le sable. Les remblais anarchiques menacent l’écosystème et transforment radicalement le paysage. Face à cette situation, experts et juristes tirent la sonnette d’alarme.

À Lambanyi, le littoral change à vue d’œil. Les remblais avancent, occupent l’espace naturel et transforment la mer en terrains destinés à la construction. La beauté naturelle de la plage se réduit peu à peu, et avec elle, l’équilibre écologique de la zone.

Lors d’une visite sur les lieux, un habitant rencontré affirme que l’eau de mer ne lui cause pas de dégâts directs, mais reconnaît que « parfois, l’eau déborde de trop ». Non loin, d’importants travaux de remblaiement sont visibles : camions, bulldozers et pelleteuses s’activent, recouvrant progressivement le littoral. Ces aménagements traduisent la pression grandissante exercée sur la côte.

Pour comprendre l’impact de ces travaux, nous avons interrogé le géographe Faya Kamano. « Les remblais modifient profondément la dynamique littorale, en changeant les courants et en accélérant l’érosion sur d’autres parties de la côte. L’utilisation de matériaux polluants dans ces remblais peut contaminer l’eau et aggraver la dégradation environnementale. Ces pratiques fragilisent durablement le littoral de Conakry », alerte le spécialiste.

Sur le plan écologique, l’expert environnementaliste Martin Luther Kourouma alerte : « La superficie des mangroves a chuté de 37% en soixante ans, compromettant la biodiversité et la protection naturelle des côtes. Les remblais et la construction d’infrastructures lourdes privent la population de l’accès au front de mer et perturbent la circulation naturelle de l’air. Seule une planification durable avec des infrastructures adaptées et respectueuses de l’écosystème pourrait sauver le littoral de sa dégradation accélérée ».

Le juriste Mamadou Aliou Sow rappelle aussi les règles légales. « Le Code civil guinéen encadre strictement l’occupation des zones riveraines et littorales. Si les propriétaires peuvent bénéficier des terrains formés naturellement par les fleuves, les zones gagnées sur la mer appartiennent exclusivement à l’État. La loi interdit tout empiètement sur le domaine maritime, considéré comme un bien public inaliénable. Il est urgent que les autorités locales renforcent le contrôle et sanctionnent les contrevenants afin de protéger le domaine public maritime », explique-t-il. 

Sur le terrain, les signes sont visibles : l’érosion grignote les berges, l’eau se trouble sous les remblais et la plage perd peu à peu son identité naturelle. Les experts insistent : sans intervention, elle pourrait subir une dégradation irréversible.

Face à ce constat, la réponse doit être rapide et coordonnée. Une planification durable, une application stricte des lois et une mobilisation collective sont nécessaires pour préserver le littoral, sa biodiversité et son rôle écologique. Protéger la plage, c’est garantir un littoral vivant et accessible, aujourd’hui et pour les générations futures.

Mayamba Traoré