Déchets à Conakry : la difficile bataille des communes pour une ville propre…
Conakry fait face à une crise de gestion des déchets. Manque de camions, incivisme et absence de politique claire freinent les communes
À Conakry, les vendeuses du marché d’Enta bravent la pluie, la boue et la précarité pour nourrir leurs familles. Entre pertes économiques et infrastructures défaillantes, leur quotidien est un combat silencieux.
Au marché d’Enta, dans la banlieue de Conakry, chaque averse est synonyme de calvaire. À chaque pluie, les allées du marché se transforment en champs de boue, rendant la circulation difficile, voire impossible. Pourtant, chaque matin, les vendeuses, en majorité des mères de famille, s'y rendent coûte que coûte. Bravant l’humidité et les pertes économiques, elles continuent de vendre pour subvenir aux besoins de leur foyer.
« Quand il pleut, l’eau envahit tout. On est obligées de rester debout dans la boue pour vendre », confie Aïssatou, vendeuse de légumes depuis plus de dix ans.
Avec de simples bâches ou des parapluies en guise d’abris, les commerçantes doivent composer avec un sol mal drainé, où l’eau stagne parfois plusieurs jours, dissuadant ainsi les clients. « Il arrive que mes oignons pourrissent avant même d’être vendus », se désole Mabinty Sylla.
Chaque semaine, cette dernière estime perdre près de 100 000 francs guinéens à cause des intempéries. Pourtant, elle ne peut pas rester chez elle. « Si je ne viens pas, je ne gagne rien. Et mes enfants ne mangeront pas », confie cette mère de famille.
La pluie pèse aussi sur la fréquentation du marché. De nombreux clients préfèrent éviter les lieux lorsque les routes deviennent glissantes et que les étals sont noyés sous l’eau. « Pendant cette saison, j'évite de venir tous les jours. Aujourd'hui, je fais des achats pour une semaine, pour éviter de marcher dans la boue chaque matin », témoigne une cliente rencontrée sur place.
Les vendeuses, elles, assistent impuissantes à la chute de leurs recettes. « Parfois, je fais le déplacement et je ne trouve même pas cinq clients », raconte Saran Doumbouya, vendeuse de friperies. Faute de ventes suffisantes, nombre d’entre elles peinent à rembourser les crédits contractés pour renouveler leurs marchandises.
Face à cette situation, les commerçantes dénoncent le manque d’action des autorités locales. « On nous promet des améliorations chaque année, mais rien ne change », déplore Hawa, une doyenne du marché. Le site ne dispose ni de caniveaux pour évacuer les eaux pluviales, ni de structures couvertes pour abriter les vendeuses. L'organisation du marché reste sommaire.
Un responsable du marché, qui a requis l’anonymat, assure que le marché d’Enta « est en attente de réhabilitation depuis plusieurs années », évoquant toutefois un « manque de financement et de volonté politique » pour justifier le retard voire l’absence de travaux.
En attendant des solutions, les vendeuses du marché d’Enta s’organisent. Certaines s’entraident pour s’abriter ou surélever leurs étals. D'autres s'installent dans les rares zones épargnées par l'eau.
Dans l’indifférence générale, elles poursuivent, jour après jour, un combat discret mais vital : celui de nourrir leurs familles et de faire vivre le marché.
Sous la pluie, dans la boue et le froid, ces femmes continuent de se battre, espérant qu'un jour, leur labeur sera reconnu et leurs conditions de travail améliorées.
Mayamba Traoré