Autrefois poumon vert de Boffa, la mangrove offrait à la population un cadre de vie apaisant. Ses palétuviers filtraient l’air, régulaient le climat et abritaient un écosystème riche en biodiversité. Mais aujourd’hui, ce havre naturel est en danger.
Sur les rives du fleuve Fatala, certains citoyens se souviennent encore de l’époque où la mangrove chantait au rythme du vent et des oiseaux. « Les palétuviers étaient denses et filtraient l’air, on respirait bien. Mais actuellement, à cause des coupes abusives à but lucratif et des constructions anarchiques dans les grandes villes, la mer avance. La disparition de la biodiversité, avec la destruction des habitats naturels, a poussé les animaux à disparaître ou à migrer vers d’autres zones. Les pêcheurs et chasseurs locaux peinent à subvenir à leurs besoins. La mangrove retenait les eaux de pluie et les marées. En la détruisant, on étend les zones inondables. On peut parler de l’installation des ports miniers à Boffa comme cause principale, mais les pêcheurs ont aussi leur part de responsabilité. Ils coupent les palétuviers toute la journée pour fumer leurs poissons, ce qui a un fort impact sur la mangrove », regrette Idrissa Wattara Bangoura, chef du port central de Boffa.

Si l’exploitation minière génère des revenus, elle détruit peu à peu un écosystème fragile. Les palétuviers, qui formaient autrefois une barrière naturelle contre l’érosion côtière, disparaissent sous la pression des installations minières. À cela s’ajoutent la montée des températures et le tarissement des cours d’eau. La population s’inquiète pour son avenir. « Il fait plus chaud qu’avant. On ne peut plus travailler aux champs après 10 heures du matin. Les palétuviers, qui nous apportaient une brise marine agréable, sont coupés soit par les pêcheurs pour fumer leurs poissons, soit pour laisser place aux ports miniers. Les poissons ne peuvent plus se reproduire sous leurs racines. Aujourd’hui, la mer avance, les terres sont avalées », explique Aboubacar Soumah.

Interrogé à ce sujet, le directeur préfectoral de l’Environnement de Boffa, Toupou Pema, exprime son inquiétude. « La dégradation actuelle de notre écosystème marin est une source de vive préoccupation. Les pressions exercées par les activités humaines, telles que la surpêche, l’installation des ports miniers et l’urbanisation côtière incontrôlée, ont des conséquences dramatiques sur la biodiversité marine, mais aussi sur les communautés qui en dépendent. La destruction des forêts réduit la capacité de la planète à absorber le gaz carbonique. L’agriculture intensive et l’usage excessif d’engrais chimiques contribuent également à l’augmentation du protoxyde d’azote. Tout cela favorise l’élévation du niveau de la mer et la multiplication des événements climatiques extrêmes, comme les inondations. Ce phénomène dépasse la Guinée, il est mondial. Il faut agir, notamment en reboisant. Parmi les gestes à adopter, il faut impérativement arrêter les coupes abusives de palétuviers », plaide-t-il.


La rareté de l’eau, la chaleur intense et la disparition de la mangrove affectent directement la sécurité alimentaire. Les cultures échouent, les poissons se font rares. C’est donc un écosystème entier qui est menacé, et avec lui, l’avenir des communautés locales.
Aly Lato Camara