Léfa : « Lassiry Hip-hop est une réponse aux besoins des jeunes »

Léfa : « Lassiry Hip-hop est une réponse aux besoins des jeunes »

Administrateur culturel et manager de projets, M’Baye Aissatou Fall, alias Léfa, est une figure incontournable du mouvement hip-hop en Guinée. Initiateur du festival Lassiry Hip-hop, il revient pour IdimiJam sur son parcours, l’impact de son festival et ses ambitions pour l’art urbain guinéen.

Administrateur culturel et manager de projets, M’Baye Aissatou Fall, alias Léfa, est une figure incontournable du mouvement hip-hop en Guinée. Initiateur du festival Lassiry Hip-hop, il revient pour IdimiJam sur son parcours, l’impact de son festival et ses ambitions pour l’art urbain guinéen.

Fresque murale - Lassiry Hip-hop


IdimiJam : Peux-tu te présenter et nous parler de ton parcours en tant qu’artiste et entrepreneur ?



Léfa : Je suis M’Baye Aissatou Fall, plus connu sous le nom de Léfa, administrateur culturel et manager de projets et d’artistes. Mon parcours a débuté avec Prince’co (paix à son âme), qui m’a initié aux bases de l’administration. Ensemble, nous avons fondé l'ONG Guinée Challenge, avec l’objectif d’aménager 10 bibliothèques dans les villes en cinq an, dans des zones reculées de Conakry. Malheureusement, nous n'avons pu en réaliser qu'une seule après son décès.

Par la suite, j’ai rejoint Nord-Sud Communication avec Al Souaré, où j’ai renforcé mes compétences administratives. En 2016, j’ai intégré G4life aux côtés de Djanii Alfa, qui m’a confié de nombreuses responsabilités. C’est dans cette dynamique que nous avons lancé Lassiry Graffiti, devenu plus tard Lassiry Hip-hop. Depuis, nous avons initié plusieurs projets, notamment Lassiry School Tour, qui promeut les métiers artistiques dans les écoles, et le Carnaval de la Santé, une initiative visant à transformer des sites insalubres en espaces attractifs, tout en favorisant l’interaction entre médecins et populations.



Quelle est l’histoire derrière la création de Lassiry Hip-hop et quelle est sa mission principale ?


Lassiry Hip-hop est né d’un constat. Beaucoup de jeunes travaillaient dans l’événementiel sans réelle formation, et de nombreux managers manquaient de compétences. Nous avons accompagné plusieurs artistes dans la réalisation de leurs rêves, mais lorsqu’il s’agissait de formation, peu d’entre eux s’y investissaient.

En observant l’impact du hip-hop à Dakar, où il sert à autonomiser les jeunes à travers les métiers des cultures urbaines, nous avons voulu répliquer ce modèle en Guinée. Lassiry Hip-hop est donc un festival qui réunit jeunes talents et professionnels autour de formations et d’activités culturelles. Nous y avons également intégré une dimension environnementale, en utilisant le graffiti pour transformer des espaces dégradés en lieux attractifs. L’objectif est de fournir aux jeunes des outils pour leur autonomie et de revaloriser l’événementiel guinéen.


Quels messages cherches-tu à faire passer à travers tes œuvres et comment choisis-tu les lieux et les thèmes de tes fresques ?

Chaque année, nous sélectionnons un thème en lien avec l’actualité et des lieux accessibles à tous. L’idée est de mettre en valeur l’image de la Guinée, qui a longtemps été un leader culturel avant de perdre cette place. Nous voulons lui redonner sa grandeur en embellissant Conakry et en racontant son histoire à travers nos fresques.

Fresque Lassiry


Peux-tu nous donner des exemples concrets des projets réalisés et les défis rencontrés sur le terrain ?

Nous avons commencé avec Lassiry Graffiti, devenu Lassiry Hip-hop, un projet audacieux qui a suscité beaucoup d’interrogations. Beaucoup avaient peur du graffiti et ne croyaient pas en notre vision. Nous avons ensuite lancé "Une femme, une image", un projet défendant les droits des femmes en les impliquant activement dans le développement.


L’un des principaux obstacles reste la perception du mouvement hip-hop par les autorités, qui n’en voient que l’aspect contestataire et ignorent son rôle dans la formation et l’autonomisation des jeunes. De plus, le manque de financement est un défi majeur. En Guinée, les entreprises préfèrent sponsoriser des événements festifs plutôt que des projets de fond. Pourtant, depuis 2018, nous avons formé près de 500 jeunes et transformé plusieurs zones insalubres en espaces valorisés.

Comment travailles-tu avec ton équipe et quelles sont tes ambitions pour l’avenir de Lassiry hip-hop et de l’art urbain en Guinée ?


Notre équipe est composée d’artistes issus de toutes les disciplines du hip-hop (rappeurs, graffeurs, danseurs, DJ, slameurs, stand-up et Rollers), mais aussi d’administrateurs, de communicants et de journalistes. Nous collaborons également avec des collectifs spécialisés, comme l’Association des danseurs de Guinée ou la Ligue guinéenne de slam, qui apportent leur expertise.

fresque - lassiry
Notre ambition est de faire de Lassiry Hip-hop l’un des plus grands festivals urbains de la sous-région et de professionnaliser les acteurs du hip-hop guinéen. Nous voulons que la Guinée devienne une référence en matière d’arts urbains en Afrique, en formant des jeunes qualifiés et compétitifs à l’international.


Quel est ton mot de la fin ?

Je tiens à vous remercier pour cette visibilité et cette force que vous nous donnez à travers ce média.

Mon message aux jeunes et aux acteurs culturels est simple : investissez dans un métier. L’industrie culturelle regorge d’opportunités encore méconnues en Guinée. Si chacun trouve sa place dans la chaîne de valeur, nous pourrons mieux vendre notre culture. Merci.


Propos recueillis par Alpha Oumar Baldé