Rentrée scolaire le 15 septembre : une décision qui ne fait pas l’unanimité auprès des parents d'élèves
En Guinée, la rentrée scolaire fixée au 15 septembre suscite débats : entre coûts élevés, jours fériés et espoirs de stabilité du calendrier
En Guinée, la rentrée scolaire fixée au 15 septembre suscite débats : entre coûts élevés, jours fériés et espoirs de stabilité du calendrier
Le ministère de l’Enseignement pré-universitaire a annoncé, lundi dernier, l’ouverture des classes sur toute l’étendue du territoire national pour le 15 septembre prochain. Une décision qui, si elle répond à la volonté des autorités de respecter le calendrier scolaire, ne laisse pas les parents d’élèves indifférents. Entre préparatifs coûteux et inquiétudes liées aux nombreux jours fériés annoncés, les avis restent partagés.
À quelques semaines de la reprise, de nombreux parents tirent déjà la sonnette d’alarme face aux charges financières. Uniformes, fournitures scolaires, frais de scolarité : autant de dépenses qui grèvent des budgets déjà fragilisés par l’inflation et la précarité.
« Nous sortons tout juste de la période des vacances où les dépenses étaient déjà importantes. Avec trois enfants à inscrire, je ne sais pas par où commencer. Rien que les frais de scolarité et les cahiers coûtent une fortune. La rentrée du 15 septembre est trop rapprochée pour nous permettre de souffler », témoigne Konaté M’Mah Soumah, rencontrée devant une vendeuse de fournitures scolaires à Yimbayah Tannerie.
Kourouma Laye, parent d’élève, partage le même constat, non sans colère : « Nous sommes très remontés par rapport à cette annonce du ministre. Le ministère ne s’est pas rendu compte de notre situation économique actuelle. La vie est dure, et ce changement est un fait nouveau. D’habitude, les vacances durent trois mois, et deux de ces mois sont payés aux enseignants. Dans ces conditions, il sera difficile pour eux d’accepter de reprendre dès le 15 septembre ».
Pour lui, la Guinée ne peut être comparée aux pays voisins souvent cités en exemple, comme le Sénégal, le Mali ou la Côte d’Ivoire : « Le calendrier de l’ouverture des classes doit être discuté avec les syndicats et les parents d’élèves. Si cette décision devait être prise, elle devrait passer en Conseil des ministres, pas être annoncée par le ministre seul ».
Même constat chez Bangoura, vendeur au marché de la Tannerie : « Franchement, c’est une grosse pression. J’ai pris un petit prêt pour préparer la rentrée de mes deux enfants. Avec les prix qui montent partout, c’est un vrai casse-tête. Je comprends le choix du gouvernement, mais les familles ne sont pas prêtes ».
Au-delà des préoccupations financières, le contexte national vient alourdir les débats. Le mois de septembre est marqué par plusieurs dates symboliques : le référendum prévu le 21, la commémoration du 28 septembre et la fête nationale du 2 octobre.
« Comment voulez-vous qu’un enfant s’adapte au rythme scolaire si, à peine rentré, il doit enchaîner des jours fériés et des interruptions ? On risque de perturber encore une fois l’année scolaire », déplore Condé Aboubacar Sidiki, fonctionnaire et père de deux collégiens.
Certains estiment que les autorités auraient dû fixer une date plus tardive pour éviter une reprise décousue. « Si la rentrée était reportée à début octobre, juste après les événements nationaux, ce serait plus logique. Les enfants commenceraient directement dans un cadre stable », avance Mariame Barry, commerçante et mère d’un élève de terminale.
Toutefois, une partie des parents voit dans cette décision une volonté d’anticiper les retards chroniques qui affectent chaque année le système éducatif.
« Nous savons que les années scolaires en Guinée sont souvent perturbées par des grèves et des crises sociales. Commencer tôt, le 15 septembre, c’est une chance de donner un peu d’avance aux élèves. Même s’il y a quelques jours fériés, l’important, c’est que les enseignants tiennent leurs cours régulièrement », estime Christine Loua, mère d’une lycéenne.
Les parents se retrouvent donc dans une situation paradoxale : ils saluent l’effort du gouvernement pour stabiliser le calendrier scolaire, mais demandent que les réalités sociales et politiques soient également prises en compte.
La principale crainte reste que cette rentrée, annoncée dans la précipitation, ne plonge encore une fois les élèves dans une année scolaire hachée. Comme le résume Traoré, enseignant et parent d’élève : « Ce qu’il faut éviter, c’est une rentrée symbolique où les enfants viennent juste occuper les bancs sans que les cours soient réellement assurés. Ce qui compte, ce n’est pas la date d’ouverture, mais la continuité et la qualité de l’enseignement ».
Ousmane Camara