La presqu’île de Kaback est une sous-préfecture située à une soixantaine de kilomètres du chef-lieu de Forécariah à l’Ouest et au Sud-Ouest de la Guinée. Cette localité est gravement affectée par l'érosion côtière. Ses habitants qui vivent principalement de la pêche, de l’agriculture et de l’élevage, sont contraints d’abandonner leurs terres…
La presqu’île de Kaback est une sous-préfecture située à une soixantaine de kilomètres du chef-lieu de Forécariah à l’Ouest et au Sud-Ouest de la Guinée. Cette localité est gravement affectée par l'érosion côtière. Ses habitants qui vivent principalement de la pêche, de l’agriculture et de l’élevage, sont contraints d’abandonner leurs terres en raison de la montée des eaux de l’océan Atlantique.
Aujourd’hui, plusieurs villages de cette sous-préfecture sont submergés. Les digues, autrefois protectrices, ont fini par céder sous la pression des vagues, laissant les populations impuissantes face à la montée des eaux. Ces habitants, qui vivaient sur des terres transmises de génération en génération, sont désormais des réfugiés climatiques, contraints de se déplacer dans des zones telles que Forécariah et Dubréka.
Un phénomène connu mais négligé
Aboubacar Sylla, porte-parole d’une association d’habitants de Kaback, décrit la situation comme étant catastrophique. « Cela fait plus de 15 ans que nos parents subissent les effets de la dégradation des digues qui protégeaient l’île. Ces digues, qui s’étendaient sur 17 à 20 kilomètres, permettaient non seulement la culture de grandes étendues de riz, de gombo et de pastèque, mais protégeaient aussi les terres contre les eaux salées. Aujourd’hui, elles ont cédé sous la pression des vagues. Les habitants sont exposés à la montée des eaux et à la dégradation de leurs champs. Ce qui accentue la pauvreté et la précarité », explique-t-il à un reporter de la plateforme IDIMIJAM.COM.
Les autorités sont parfaitement au courant de cette situation, mais aucune solution durable n’a été mise en place. « Il y a eu des initiatives, mais elles n’ont pas abouti. Ce qu’il faut, c’est une véritable digue, un projet de grande envergure. Des entreprises ont essayé, mais sans succès jusqu’à présent », déplore Aboubacar Sylla.
Des vies « autonomes », maintenant plongées dans la précarité
Toujours selon Aboubacar Sylla, plusieurs familles ont été contraintes de quitter leurs habitations face à l’avancée inexorable de la mer. « De nombreuses maisons sont déjà submergées. Certains habitants ont rejoint des localités comme Tayaki, près de Conakry, d’autres sont à Maferinyah ou ont trouvé refuge chez des proches dans des zones moins touchées. Ces personnes, autrefois autonomes grâce à l’agriculture, la pêche et l’élevage, vivent maintenant dans une pauvreté extrême », explique-t-il, appelant les autorités à agir rapidement.
Inondations en saison sèche
En mars dernier, Kaback a connu une inondation inattendue, hors de la saison des pluies. « Les dégâts étaient considérables, et la crainte que cela se reproduise est omniprésente. Nous implorons les autorités de financer le projet de construction d’une digue, car le projet existe. Des partenaires ont déjà évalué la situation et réalisé des études, mais il faut maintenant agir », insiste Aboubacar Sylla.
Les causes de l’érosion côtière selon les autorités

Lamah You Camara, Directeur Général du Centre National de Protection du Milieu Marin et de l'Érosion Côtière
Lamah You Camara, Directeur Général du Centre National de Protection du Milieu Marin et de l'Érosion Côtière, reconnaît la situation critique de Kaback et explique que les causes de l’érosion côtière sont multiples et peuvent être naturelles ou dues aux activités humaines. Parmi les facteurs anthropiques, il cite le déboisement de la mangrove, qui joue un rôle crucial de barrière naturelle, ainsi que les pratiques locales telles que le fumage de poissons, l’agriculture ou l’extraction de sel. « Nous assistons à une élévation du niveau de la mer, un phénomène qui dégrade la ligne côtière et cause des inondations. Les conséquences sont graves : non seulement les terres agricoles deviennent impraticables, mais des espèces aquatiques sont menacées, ce qui réduit les ressources halieutiques pour la population », précise-t-il.
Restaurer les zones dégradées pour limiter les dégâts
Pour freiner l’érosion côtière, Lamah You Camara propose de restaurer les zones dégradées, notamment les mangroves, et de limiter l’occupation illégale des terres. « La Guinée possède un vaste plateau continental, riche en biodiversité, et une côte qui représente 15% du territoire national. Il est crucial de protéger ce patrimoine en restaurant les écosystèmes côtiers et en empêchant les occupations illégales, notamment les remblais », préconise-t-il.
En outre, il insiste sur la nécessité de sensibiliser les populations. « Les citoyens ne comprennent souvent pas les causes des phénomènes qu’ils subissent. C’est à nous, responsables, de multiplier les campagnes d’information et de sensibilisation », conclut-il.
Mamadou Bhoye Barry