Viol sur mineurs en Guinée : les défis du respect de l'anonymat des victimes

Viol sur mineurs en Guinée : les défis du respect de l'anonymat des victimes

En 2024, le viol sur mineurs est resté un problème alarmant en Guinée, affectant des centaines d'adolescents à travers le pays. Bien que des efforts considérables aient été faits pour sensibiliser la population et lutter contre ce fléau, les chiffres relatifs aux agressions sexuelles sur mineurs restent préoccupants.

En 2024, le viol sur mineurs est resté un problème alarmant en Guinée, affectant des centaines d'adolescents à travers le pays. Bien que des efforts considérables aient été faits pour sensibiliser la population et lutter contre ce fléau, les chiffres relatifs aux agressions sexuelles sur mineurs restent préoccupants. À ce défi s’ajoutent les enjeux liés à la protection des victimes, notamment le respect de leur droit à l'anonymat, un aspect fondamental pour leur sécurité et leur bien-être.

Malgré une légère baisse des signalements par rapport à 2023, les statistiques de 2024 sur les viols de mineurs en Guinée sont demeurées alarmantes. Selon l’Office de protection du genre, de l’enfance et des mœurs (OPROGEM), 225 viols ont été enregistrés sur le territoire national. Une baisse des cas a cependant été observée dans les préfectures de Coyah et Dubréka. Pour Marie Gomez, commissaire divisionnaire et directrice de l’OPROGEM, la mission de protection des victimes reste prioritaire, mais le respect du droit à l'anonymat est crucial. « Chaque jour, nous enregistrons des cas de violences basées sur le genre, avec une concentration inquiétante à Dubréka et Coyah, où certains viols sont suivis de meurtres. En 2024, nous avons recensé 225 viols, 37 cas de séquestration et 48 enlèvements d’enfants », déclare-t-elle. L’OPROGEM s'efforce d'assurer la protection des victimes, en floutant les visages des accusés et en couvrant ceux des victimes lors de leur présentation à la presse, afin d'éviter leur stigmatisation.

La peur du stigmate et du silence des victimes

La réticence des victimes à dénoncer les agresseurs demeure un obstacle majeur. Selon Thérèse Akakpo, responsable protection Jeunes et Enfants du Club des jeunes filles leaders de Guinée, 90% des victimes exigent l'anonymat de peur de représailles ou de stigmatisation. Sur 63 cas signalés en 2024 par l’ONG de défense des droits humains, 10 concernaient des agressions sexuelles sur mineures. Cependant, près de 30% de ces cas restent non résolus, faute de soutien et de poursuites judiciaires, souvent à cause du poids du silence ou du désistement des victimes en cours de procédure. « La peur des représailles familiales, notamment lorsque l'agresseur est un membre de la famille, pousse de nombreuses victimes à se retirer de la procédure. Cependant, il est essentiel de protéger les victimes et de garantir leur accompagnement judiciaire », explique Thérèse Akakpo.

Le droit à l'anonymat des victimes de violences sexuelles est fondamental pour éviter la double victimisation. Mais, cette protection est fréquemment bafouée. 

Me Halimatou Camara, avocate au Barreau de Guinée, souligne que bien que des lois aient été votées pour protéger les victimes, leur mise en œuvre demeure insuffisante. Selon elle, il est indispensable de renforcer la politique pénale pour combattre la prolifération des viols, notamment ceux suivis de meurtres, de plus en plus fréquents dans les écoles. « Nous devons agir de manière plus concrète pour mettre fin à ce phénomène. Les victimes méritent d’être protégées et leur anonymat respecté, y compris dans les médias. Malheureusement, la loi ne suffit pas encore à garantir cette protection », regrette-t-elle.

Le rôle des médias et des journalistes

Les journalistes jouent un rôle clé dans la couverture des violences sexuelles, mais la médiatisation de ces actes doit se faire dans le respect total de l'anonymat des victimes. Amadou Diallo, journaliste spécialiste des violences sexuelles, déplore le non-respect de ce droit, notamment dans les médias. Il mentionne plusieurs cas tragiques, dont celui de M’Mahawa Camara, une élève violée et ligotée dans les toilettes de son école à Kagbelen, dans la périphérie de Conakry, ainsi que celui d'Aïcha Bah, une jeune fille violée et tuée à la mosquée de son école à Dondoli Khouré, aux portes de la capitale guinéenne. « En 2024, des dizaines de victimes, dont des enfants de moins de 13 ans, ont été victimes de viols. Pourtant, la protection de leur anonymat reste un défi majeur. De nombreux journalistes, ainsi que des fonctionnaires dans les commissariats et hôpitaux, ne respectent pas cette règle essentielle », explique M. Diallo.

Les conséquences et les solutions à envisager

Les victimes de viols subissent souvent des traumatismes psychologiques et physiques graves, qui peuvent les marquer à vie. Les conséquences sont particulièrement sévères pour les filles, mais les garçons ne sont pas exempts de ce fléau. La réponse judiciaire à ces crimes est encore lente et insatisfaisante. Ce qui freine l'accès à la justice pour les victimes.

Les autorités et les acteurs de la société civile doivent intensifier leurs efforts pour garantir la protection des victimes, améliorer les conditions de signalement des infractions et s'assurer que les lois existantes soient effectivement mises en œuvre. Le respect du droit à l'anonymat des victimes et des témoins doit être une priorité pour éviter qu'elles ne subissent des violences supplémentaires.

Malick Diakité