Haoulatou Diallo, survivante d’un samedi sanglant à Conakry

Haoulatou Diallo, survivante d’un samedi sanglant à Conakry

« Ligotée, criblée de cinq balles en pleine journée… J’ai cru que j’allais mourir. Mais j’ai survécu ».

Le 29 mars 2025 restera à jamais gravé dans la mémoire de Haoulatou Diallo. Ce jour-là, en plein cœur de l’après-midi, elle a été la cible d’une attaque à main armée sur son lieu de travail, une agence de transfert d’argent située dans le quartier Lambanyi, en banlieue de Conakry. Il était 14 heures lorsqu’elle a reçu cinq balles. Trois mois après les faits, si ses plaies physiques commencent à cicatriser, les blessures psychologiques, elles, restent béantes.

Une journée ordinaire devenue cauchemar

Comme chaque samedi, Haoulatou s’était rendue à l’agence avec sa collègue. Rien ne laissait présager le drame. Mais à 14 heures précises, ce jour-là, deux hommes sont entrés dans le bureau, sous prétexte de vouloir effectuer un transfert via Cellcom. « Le premier a demandé s’il pouvait faire un transfert Cellcom. Ma collègue a répondu qu’il n’y en avait pas. Le second a alors passé un appel à l’extérieur pour informer qu’il n’y avait que pour Orange », se souvient-elle.

Quelques instants plus tard, deux autres individus les ont rejoints. À présent, ils étaient quatre. Et la situation a basculé. Les assaillants ont sorti des armes et pris possession des lieux. Deux d’entre eux ont pénétré dans les cabines, pendant que les deux autres montaient la garde.

Ligotée, puis criblée de balles

« Ils nous ont bâillonnées, ligotées, puis ont commencé à fouiller et emporter l’argent. J’étais avec ma collègue sous la cabine, moi devant, elle derrière. Et alors qu’ils sortaient, l’un d’eux s’est retourné et a tiré... sans raison apparente », raconte-t-elle. 

Haoulatou reçoit cinq balles. Sa collègue, miraculeusement, n’est pas touchée. « J’ai été blessée au talon gauche, au genou, au coude gauche et à l’abdomen. Sur le moment, je ne savais pas combien de balles j’avais reçues. C’est à l’hôpital qu’on m’a annoncé que j’en avais cinq », se souvient la miraculée.

Dix jours d’hospitalisation, une convalescence à rallonge

Transportée d’urgence au Centre hospitalier national de Donka, Haoulatou y restera dix jours. Le reste du traitement s’est poursuivi à domicile, sous surveillance médicale. Aujourd’hui encore, elle garde des séquelles visibles. « Les cicatrices sont là. Certaines blessures se referment lentement. Je ne marche pas encore correctement. Mon talon, touché à la cheville, me fait toujours souffrir », confie la jeune femme.

Un traumatisme invisible mais tenace

Si son corps tente de guérir, son esprit, lui, reste profondément marqué. Haoulatou redoute désormais les bruits forts, les visages menaçants, les souvenirs : « Depuis l’attaque, je n’ose plus faire certaines choses. Un bruit soudain me fait sursauter. Et quand je croise quelqu’un au visage dur ou menaçant, je panique. L’un des agresseurs avait un visage très dur, et rien que de m’en souvenir me fait peur ».

Jusqu’ici, elle n’a bénéficié d’aucun accompagnement psychologique. « J’aimerais consulter un psy, mais je me suis concentrée sur la guérison physique. Cinq balles dans le corps, huit blessures au total… Les balles sont entrées et sorties », confie-t-elle.

Une enquête ouverte, des arrestations… 

Peu après l’agression, la société de transfert pour laquelle travaille la jeune femme a porté plainte contre X auprès de la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ). Des agents sont venus recueillir le témoignage de Haoulatou à l’hôpital. Et quelques semaines plus tard, une première avancée est enregistrée. « D’après mes dernières nouvelles, les malfrats ont été arrêtés. Ils seraient entre les mains de la justice », dit-elle.

Haoulatou Diallo ne souhaite qu’une chose : la sécurité. Pour elle, pour ses proches, pour toutes celles et ceux qui, comme elle, vivent dans la peur. « En Guinée, l’insécurité règne. Ce qui m’est arrivé, en pleine journée, c’est inacceptable. La douleur que j’ai ressentie, autant dans mon corps que dans ma tête, je ne la souhaite à personne », confie la victime.