Guinée : les biologistes médicaux en quête de reconnaissance et de moyens
La biologie médicale, pilier du système de santé en Guinée, reste sous-évaluée. Découvrez son rôle clé, ses défis et les revendications des biologistes.
L’obésité est en passe de devenir un problème majeur de santé publique en Guinée. Selon l’enquête nutritionnelle SMART 2022 menée par l’UNICEF, 39% des adultes guinéens souffrent de surcharge pondérale, dont 15% d’obésité.
L’obésité est en passe de devenir un problème majeur de santé publique en Guinée. Selon l’enquête nutritionnelle SMART 2022 menée par l’UNICEF, 39% des adultes guinéens souffrent de surcharge pondérale, dont 15% d’obésité. Ce taux varie fortement selon les régions, allant de 27% à Faranah à 63% à Conakry, particulièrement chez les adultes âgés de 20 à 49 ans. Derrière ces chiffres alarmants, des causes multiples et un manque criant de prise de conscience sont pointés du doigt par les spécialistes.
Si l’obésité est reconnue comme une maladie chronique dans de nombreux pays, en Guinée, elle reste souvent perçue comme un simple état corporel et non comme une menace réelle pour la santé. Le Dr Saran Keita, nutritionniste, insiste sur cette méconnaissance : « Déjà, dans notre pays, l’obésité n’est pas considérée comme une maladie en tant que telle, alors que c’est réellement une maladie. Voilà pourquoi il n’y a pas de statistiques réelles sur le sujet ».
Pourtant, les conséquences de l’obésité sont nombreuses : maladies cardiovasculaires, diabète, hypertension, troubles articulaires, sans oublier un impact psychologique et social important.
L’obésité résulte principalement d’un déséquilibre entre l’apport et la dépense énergétique. Une alimentation trop riche en calories, combinée à un manque d’activité physique, est le premier facteur incriminé. « On mange n’importe comment et on ne pratique pas d’activité physique. On ne dépense pas l’énergie consommée », explique le Dr Saran Keita.
D’autres éléments jouent également un rôle, notamment les facteurs génétiques et hormonaux. Certaines personnes ont une prédisposition à l’obésité, notamment en raison de troubles hormonaux ou de traitements médicamenteux (contraceptifs, corticoïdes, antidépresseurs).
La sédentarité et l’urbanisation sont également des causes majeures. Le mode de vie moderne, particulièrement en ville, réduit les opportunités d’exercice physique. Elisabeth Guilavogui en témoigne : « En arrivant à Conakry, j’ai arrêté de bouger comme avant. Je cuisinais, puis je mangeais et je dormais. En 2015, j’étais encore mince avec un poids normal, mais après notre déménagement à Conakry, tout a changé. Avant, j’habitais un immeuble de neuf étages avec des ascenseurs souvent en panne, me poussant à prendre régulièrement les escaliers. Une fois à Conakry, je bougeais moins, je cuisinais et je mangeais plus, et surtout, j’avais plus d’argent. Petit à petit, j’ai pris de la graisse. Ce n’est que lorsque j’ai commencé à étouffer et à avoir du mal à faire certaines choses que j’ai compris que c’était un problème ».
Selon le Dr Saran Keita, le stress et l’anxiété influencent également les comportements alimentaires et favorisent la prise de poids. Un autre facteur souvent négligé en Guinée est la perception culturelle du corps. « Lorsqu’une personne est grosse, c’est synonyme de tranquillité et de répit, alors que malheureusement non », souligne la spécialiste.
Dr Saran Keita
L’obésité ne se limite pas à une question de santé physique. Son impact psychologique et social est tout aussi important. Mademoiselle Kaba raconte son expérience : « Depuis ma prise de poids incontrôlée, je suis devenue le centre des moqueries de mes proches. Cela me complexe davantage, car je ne me sens plus bien dans ma peau et dans ma tête ». Quant à Elisabeth Guilavogui, elle lutte au quotidien pour adopter un mode de vie plus sain : « Mon principal défi dans cette lutte contre l’obésité reste mon alimentation, surtout la nuit. Je me suis finalement mise au sport dans une salle de gym récemment, mais c’est plutôt dur. Je fais donc de la marche et j’essaie de ne pas trop grignoter ».
Le Dr Saran Keita insiste sur la nécessité d’une prise de conscience individuelle et collective. Voici quelques unes de ses recommandations essentielles :
L’obésité en Guinée ne se résume pas à des chiffres, elle représente une réalité qui touche de nombreuses personnes au quotidien, avec des conséquences bien réelles sur leur santé physique et mentale. Derrière chaque statistique, il y a des histoires comme celles d’Elisabeth et de Mademoiselle Kaba, qui se battent pour retrouver un équilibre, souvent sans soutien adapté.
Plutôt que de juger, il est essentiel d’écouter et d’accompagner. Lutter contre l’obésité ne se résume pas à dire "mangez mieux et bougez plus". Il faut aussi reconnaître les défis rencontrés : l’influence du mode de vie, le stress, les contraintes économiques et culturelles.
Il ne s’agit pas de correspondre à une norme, mais de permettre à chacun de vivre mieux, en meilleure santé et en harmonie avec son corps. Parce qu’au final, il ne s’agit pas seulement de chiffres, mais de vies.
Adama Hawa Bah